Pertes de l’odorat et du goût sont deux symptômes aujourd’hui étroitement liés au COVID19. Le 22 mars dernier, avant que les médias ne les relaient largement, Yann Ravussin, maître-assistant au Département de médecine de l’Unifr et le Professeur Jean-François Gauthier, endocrinologue à l’Hôpital Lariboisière de Paris, proposaient leur observations de terrain à la revue Obesity Journal.
Il y a quelques semaines, Yann Ravussin, chercheur dans le domaine de l’obésité, ressent soudain une grande fatigue et de forts maux de tête, accompagnés d’une perte du goût et de l’odorat. Ne présentant alors ni fièvre, ni toux, ni problèmes respiratoires, il n’est pas considéré comme personne à risque et donc pas éligible pour un test COVID19. Réalisant tout de même que ces symptômes sont fréquemment reportés, il prend contact avec de nombreux spécialistes pour confirmer ses soupçons.
Symptômes ignorés en Chine
De son côté, le Prof. Gauthier, spécialiste en diabète et en endocrinologie, transforme ses lits de l’Hôpital Lariboisière en unité dédiée au COVID19 dès le début de l’épidémie. Au contact quotidien avec les patients et d’autres médecins, il réalise rapidement que la perte soudaine d’odorat (anosmie) et de goût (agueusie) sont récurrents chez les patients testés positifs, voire sont parfois les seuls symptômes, alors même qu’ils ne semblaient pas prévalents, ou que peu reportés en Chine.
Attirer l’attention
Tous deux dĂ©cident alors de rĂ©diger une lettre au rĂ©dacteur en chef de la revue Obesity Journal. «J’ai contactĂ© cinq travailleurs mĂ©dicaux de première ligne que je connais personnellement en France, en Italie, aux Etats-Unis et au BrĂ©sil, explique Yann Ravussin. Ils ont tous dĂ©clarĂ© que ces symptĂ´mes Ă©taient souvent signalĂ©s. Notre lettre avait pour but d’essayer de relayer plus largement cette information, en particulier aux personnes qui vivent avec l’obĂ©sitĂ©, car cette comorbiditĂ© semble ĂŞtre un facteur prĂ©disposant Ă de plus mauvais rĂ©sultats cliniques. J’ai alors reçu la confirmation de mĂ©decins français qu’ils utilisaient la perte de l’odorat et/ou du goĂ»t comme un rĂ©sultat positif quasi certain pour le COVID19.»
Mieux comprendre la maladie
Yann Ravussin, aujourd’hui complètement guĂ©ri, est heureux d’avoir tirĂ© la sonnette d’alarme. Suite Ă la publication de la lettre, il a nouĂ© des contacts avec plusieurs institutions, dont l’UniversitĂ© de Columbia, pour essayer d’aider Ă l’organisation scientifique de la collecte de donnĂ©es auprès des hĂ´pitaux afin de mieux comprendre la maladie. Et de conclure: «Ces symptĂ´mes devraient ĂŞtre considĂ©rĂ©s par le grand public comme des indicateurs importants pour dĂ©terminer s’ils doivent ĂŞtre testĂ©s et renforcer l’isolement social ou les mesures de distanciation.»
- de Yann Ravussin
- original publié dans Obesity Journal
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