pro ethnographica – Alma & Georges /alma-georges Le magazine web de l'Université de Fribourg Wed, 03 Jul 2024 06:36:26 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.3.5 Epilogue pour des trésors glanés sur les cinq continents /alma-georges/articles/2024/epilogue-pour-des-tresors-glanes-sur-les-cinq-continents /alma-georges/articles/2024/epilogue-pour-des-tresors-glanes-sur-les-cinq-continents#respond Tue, 18 Jun 2024 11:46:55 +0000 /alma-georges?p=20436 Chassés en mars des prisons de Bulle où ils avaient trouvé un havre temporaire, les 2000 objets ethnographiques glanés par les premiers anthropologues de l’Université de Fribourg, dans des circonstances et selon des modalités à éclairer, ont finalement pu trouver un nouveau foyer. Après une angoissante période d’incertitude, les membres de l’Association Pro Ethnographica ont déniché des locaux adaptés au Marly Innovation Center. Alors que l’emménagement est en cours, Milène C. Rossi, présidente de l’association, et Hans Werhonig, membre du comité, ne cachent pas leur soulagement.

En décembre, nous vous avions rencontrés presque désespérés car les 2000 objets de votre précieuse collection risquaient de se trouver à la rue.
Nous ne dirions pas désespérés mais plutôt «embêtés». Au sein de Pro Ethnographica, nous travaillons toutes et tous bénévolement et nos disponibilités sont donc limitées. Devoir gérer cette situation en marge de nos emplois respectifs n’était évidemment pas très confortable. Cela dit, nous n’avons même pas eu le temps de nous faire du souci. Peut-être que nous étions même dans le déni!

Comment avez-vous réussi à débloquer la situation?
Nous avons frappé à de nombreuses portes, principalement à Fribourg, d’où viennent les membres du comité, ce qui a permis d’établir des contacts et de visiter des locaux sur place. Nous avons eu de multiples échanges très intéressants avec beaucoup de personnes qui se sont montrées très solidaires et nous ont donné de nombreuses pistes. Qu’elles en soient chaleureusement remerciées!

Et j’imagine que, pour corser le tout, stocker cette précieuse collection requiert des conditions particulières?
Il est vrai que nous avons des exigences bien spécifiques: il nous faut de l’espace, une certaine sécurité afin d’éviter les vols, des pièces dont la température et le taux d’humidité soient sous contrôle et facilement accessibles de surcroît. Tout cela à un prix abordable, bien sûr.

C’est donc ainsi que vous avez jeté votre dévolu sur le Marly Innovation Center (MIC)?
C’est David Da Cruz, l’un de nos collègues fribourgeois, qui nous en a suggéré l’idée. Il s’est avéré qu’Anne Lachat, l’une des membres de notre comité, connaissait très bien Jean-Marc Métrailler, le directeur du MIC. Hans Werhonig, Thomas Merz, Anne Lachat et Ming Liu Baier ont visité les lieux et le contact humain a fait le reste.

Ces locaux qu’occupait auparavant l’entreprise Ilford conviennent-ils au stockage des objets de votre collection?
Nous avons évalué les risques potentiels avec Valentin Boissonnas de la Haute-Ecole ARC de Neuchâtel. Grâce à son expertise, nous avons pu neutraliser les possibles dangers, tels que l’excès de lumière et la présence d’insectes indésirables.

L’argent étant le nerf de la guerre, le loyer est-il abordable?
Il est tout à fait abordable pour le nombre de mètres carrés à disposition. Rien n’est gratuit cependant et il est clair que la responsabilité d’une telle collection ne saurait reposer éternellement sur les frêles épaules de bénévoles. Nous avons notamment pu bénéficier de l’aide financière de l’Office fédéral de la culture et de la Loterie Romande pour un projet, mais nous explorons plusieurs pistes, dont celle de l’Université de Fribourg, où ont été stockés ces objets durant des décennies. Nous verrions d’un bon œil un coup de pouce de la part de cette dernière en échange d’un accès total à notre collection. Quant à l’argent des contribuables, nous préférons ne pas y avoir recours ou ne l’utiliser qu’avec une extrême parcimonie.

Et y a-t-il une nouvelle date butoir à partir de laquelle vous devrez à repartir?
Nous avons signé un bail pour une durée de 10 ans, ce qui est long et nous permettra d’éviter de retraverser une phase d’incertitude comme celle que nous venons de connaître.

L’histoire coloniale a le vent en poupe, avez-vous pu créer des synergies avec des chercheuses et chercheurs, notamment de l’Université de Fribourg?
Nous avons eu la chance d’avoir été invités à l’après-midi de présentations qui précédait le . Des étudiant·e·s y ont exposé leurs recherches menées sur les collections de Pro Ethnographica. Il nous semble que l’intérêt est là. C’est un bon signe. Nous encourageons vivement le corps enseignant et les étudiant·e·s à prendre contact avec nous car la collection doit vivre et ne pas rester dans ses boîtes, même si elles sont très jolies.

Certains objets sont très beaux et ont une grande valeur ethnographique. Le public non initié pourra-t-il également en profiter?
Tout le monde est le bienvenu. Il suffit de faire une demande à Pro Ethnographica. Nous organisons des visites pour des groupes jusqu’à douze personnes. Cela dit, il faudrait que nous puissions mettre des objets en valeur, mais installer des vitrines prendrait de la place et s’avérerait dispendieux. En dehors de nos locaux, nous avons établi des contacts avec de potentiels lieux d’exposition grâce aux recherches de Sylvia Hobbs, qui a travaillé pour nous. Nous souhaiterions également beaucoup que des étudiant·e·s mettent sur pied une exposition. Cela constituerait une excellente préparation à la vie professionnelle, par exemple dans le cadre d’un module d’histoire de l’art, d’anthropologie, de science des religions, de muséologie ou autre.

Pour finir, ces écueils ne vous font-ils pas regretter de vous être embarqués dans la galère Pro Ethnographica?
Sur le plan humain, nous sommes une très bonne équipe, ce qui permet des échanges ouverts et, surtout, d’affronter sereinement les difficultés. Les quelques désagréments passagers ne rendent que plus belle l’aventure Pro Ethnographica!

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  • Photo: © Stéphane Schmutz /
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Une importante collection ethnographique bientôt SDF /alma-georges/articles/2023/une-importante-collection-ethnographique-bientot-sdf /alma-georges/articles/2023/une-importante-collection-ethnographique-bientot-sdf#respond Fri, 15 Dec 2023 07:26:03 +0000 /alma-georges?p=19421 Tels les parents du divin enfant, les membres de Pro Ethnographica cherchent déséspérement un nouveau toit pour accueillir la prunelle de leur yeux, une collection ethnographique de plus de 2800 pièces. Glânés aux quatre coins de la planète par les premiers anthropologues de l’Université de Fribourg, puis stockés durant des décennies dans les sous-sols de Miséricorde, ces objets avaient finalement trouvé refuge dans les anciennes prisons du château de Bulle. Malheureusement, dans quelques mois déjà, le bail arrivera à son terme. Milena Rossi, présidente de Pro Ethnographica, tire la sonnette d’alarme.

Trois ans après votre installation au château de Bulle, vous allez devoir évacuer les lieux. Que va-t-il advenir des 2000 objets de la collection si aucune solution n’est trouvée?
Les objets seront de toutes manières conservés, quoi qu’il arrive. Le worst case scénario étant un dépôt ou compactus. Ils ne seront ni vendus (pas de mon vivant en tout cas!) ni dispersés. Sinon nous aurions fait tout cela pour rien. Nous pouvons bien entendu faire un prêt «longue durée» pour un musée, qui a des liens thématiques avec nous afin que les objets soient valorisés et montrés.

L’ancienne prison de Bulle constituait une solution temporaire, n’a-t-il pas été possible de trouver une alternative viable entre-temps?
Comme souvent, il y a beaucoup de discussions et d’intérêt, et ce depuis longtemps, mais lorsque les choses deviennent concrètes, c’est un peu plus difficile. Et c’est normal car ce sont des engagements importants pour ceux qui les prennent, enfin surtout pour les institutions qui nous accueilleraient. La Suisse est un des pays qui compte le plus de collections et nous ne sommes donc pas les seuls à avoir envie d’avoir un espace à nous. Les dépôts des musées sont pleins et ces derniers n’exposent en général que 2 % de leur réserve.

Depuis que vous avez récupéré ces collections ethnographiques, quel a été le travail effectué par Pro Ethnographica?
Nous avons obtenu près de CHF 200 000.- de l’Office Fédéral de la Culture et de la Loterie Romande, ce qui n’est pas peu, pour un projet de recherche de provenance. Nous avons confié cette mission au Cabinet Lange & Schmutz, auquel l’argent revient en transitant par Pro Ethnographica. Ça a été une belle victoire que d’obtenir ce soutien financier pour lequel nous sommes très reconnaissants. Les élèves de la Haute Ecole de Neuchâtel (ARC) rénovent nos objets, ce qui est une situation gagnant-gagnant pour eux et nous. Nous tenons informés notre «fan club» avec la publication de notre Gazette, petit journal digital, qui paraît environ trois fois l’an. Nous avons aussi publié le très bel ouvrage du Professeur François Ruegg, avec une ligne de publication dans la maison d’édition Kment Verlag. D’autres ouvrages suivront. N’oublions pas de mentionner notre site web :

Que vous reste-t-il à faire?
Nous ne nous fixons pas de limites hormis celles que nous imposent nos ressources en temps. Les membres du comité ne sont pas payés. Pour prendre mon exemple, je suis la Présidente mais je travaille à 80 % au théâtre des marionnettes à Genève. Ça nous laisse peu de temps pour toutes nos ambitions, donc nous avançons au coup par coup. Nous avons la chance de bénéficier en la personne de Sylvia Hobbs d’une collaboratrice pour quelques temps. Je suis toujours impressionnée du chemin qui a été accompli par la seule volonté et force de notre comité. C’est une équipe remarquable!

Pour jeter une bouteille à la mer, quel est l’endroit de vos rêves pour accueillir les collections de Pro Ethnographica?
Le plus important sont les conditions de conservation (pas d’humidité ou autre moisissure), pour une surface d’environ 200 m2, ça dépend si les objets sont exposés ou en étagère. En ce qui concerne le lieu, nous ne sommes pas liés géographiquement au Canton de Fribourg selon nos statuts. Le mieux serait bien entendu que les objets soient visibles mais une solution de dépôt avec accès peut bien entendu être envisagée. Le plus important pour nous est d’éviter des coûts fixes trop élevés pour investir notre budget dans de la recherche ou autres. Si nous avons des dépenses fixes, il nous faudrait plus de revenus et donc facturer des tickets d’entrée, mais alors là, on s’éloigne souvent de la fameuse «mission pédagogique» des institutions de recherche. Et la recherche, c’est quand même un peu dans notre ADN, vu que la collection venait de l’Université de Fribourg. Pour conclure, j’ai vraiment le sentiment, et c’est peut-être un peu présomptueux de ma part, que tout le monde «aime» Pro Ethnographica et nous soutient. Il faut juste trouver le «chemin».

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