pédagogie spécialisée – Alma & Georges /alma-georges Le magazine web de l'Université de Fribourg Tue, 06 May 2025 13:01:22 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.3.5 Vivre le sport autrement /alma-georges/articles/2025/vivre-le-sport-autrement /alma-georges/articles/2025/vivre-le-sport-autrement#respond Wed, 30 Apr 2025 06:14:47 +0000 /alma-georges?p=22240 Impossible d’exceller dans le sport handicap sans développer une sorte de sixième sens. Une quinzaine d’étudiant·e·s en ont fait l’expérience le 3 avril dernier, lors du Paralympic School Day, une journée de sensibilisation aux handicaps récemment introduite par l’Université de Fribourg.

Cette étudiante qui abaisse furtivement le bandeau couvrant ses yeux mériterait sans doute un carton rouge. Mais comment ne pas être désorientée lorsqu’on joue au football à l’aveugle? Où sont les buts? Où se trouvent les coéquipier·ère·s? Douze étudiant·e·s du Bachelorpédagogie spécialisée et un courageux étudiant en sport ont participé à une expérience d’inclusion inversée.


«Le concept est simple: il consiste à inviter des personnes sans handicap à participer à des activités inspirées des sports paralympiques», explique Valérie Caron, lectrice au Département de pédagogie spécialisée et instigatrice du projet. «Elles ont ainsi l’occasion de vivre les défis rencontrés par les personnes avec handicap.» L’objectif est clair: favoriser l’empathie, la compréhension et un changement de regard en inversant les rôles habituels.

Du football qui se joue à l’ouïe
Et de l’empathie, il en faut – une bonne dose même! C’est ce qu’a constaté Matthias Scanio, étudiant en Bachelor de sport. Pour cette première édition fribourgeoise du Paralympic School Day, il avait pour mission d’organiser une activité de goalball, un sport d’équipe destiné aux personnes aveugles ou malvoyantes. Il se joue à trois contre trois sur un terrain de la taille d’un terrain de volley.

«Bien que j’aie soigneusement préparé l’activité, j’ai dû me rendre à l’évidence: il n’est pas facile de donner des explications claires et univoques à des personnes malvoyantes, reconnaît-il. Il ne suffit pas de dire «Avance» ou «Viens ici», il faut préciser le nombre de pas et la direction.»
Comme pour illustrer ses propos, un étudiant au poste de gardien, les yeux bandés, plonge à l’instinct pour intercepter le ballon. Muni de grelots, ce dernier tintinnabule à chaque rebond : c’est à l’ouïe que le portier doit en deviner la trajectoire. Calcul presque parfait… mais le ballon glisse entre ses mains et atterrit sur son nez — plus de peur que de mal.
«C’est en se mettant dans la peau d’une personne en situation de handicap qu’on comprend que la notion de capacité est relative», relève Valérie Caron. En se remémorant les matchs auxquels elle a assisté lors des derniers Jeux paralympiques, elle s’émerveille: «C’était magnifique! Les joueurs avaient véritablement développé un sixième sens.»

Emma Chetelat

De la théorie à la pratique
Dans l’autre moitié de la salle de sport de Miséricorde, les étudiant·e·s ont testé une seconde activité, conçue cette fois pour les personnes paralysées des jambes.
«Il s’agit du hockey luge, un sport d’équipe normalement pratiqué sur glace, avec des luges munies de lames», précise Valérie Caron. «Comme nous jouons en salle, nous avons utilisé des planches à roulettes achetées en grande surface.»
Étudiante en pédagogie spécialisée, Emma Chetelat a coordonné l’activité pour ses camarades. Ayant déjà travaillé avec des personnes atteintes de troubles cognitifs et moteurs, elle sait que cette expérience immersive est extrêmement enrichissante. «Par-dessus tout, j’apprécie de passer de la théorie à la pratique!», s’exclame-t-elle. Pour Mathias Sciano, cette journée inclusive tombe à pic : son cursus en sport ne propose aucune formation sur le handicap. Inversement, le Département de pédagogie spécialisée ne prévoyait jusqu’ici aucune activité physique pour ses étudiant·e·s. Et Emma d’ajouter: « J’espère vivement que la prochaine édition de ce cours rassemblera encore plus de participant·e·s, et pas seulement de la pédagogie spécialisée!»

Le sport, ce grand oublié
Quel que soit le sport pratiqué lors de cette matinée — goalball, hockey luge ou football pour amputé·e·s — le Paralympic School Day dépasse largement le simple exercice physique. Il transmet aussi un message. «Il faut savoir que le sport est hélas très souvent le parent pauvre de l’enseignement spécialisé», déplore Valérie Caron. «L’éducation physique adaptée est peu développée en Suisse, alors que dans certains pays, comme aux Etats-Unis, il y a des programmes de Bachelor et Master qui y sont entièrement consacrés.»
On conçoit aisément qu’un·e enseignant·e d’éducation physique, face à une classe de vingt élèves, peine à intégrer une ou deux personnes avec un handicap. «Hélas, sans entraînement et adaptations, ces jeunes sont plus à risque de développer des retards moteurs, par exemple, avoir des difficultés à manipuler un ballon, des retards dans les habiletés de locomotion ou être plus à risque de sédentarité», regrette-t-elle.

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«Les étudiant·e·s présentant un trouble du spectre autistique abandonnent plus souvent leurs études !» /alma-georges/articles/2024/studierende-mit-einer-autismus-spektrum-storung-brechen-das-studium-haufiger-ab /alma-georges/articles/2024/studierende-mit-einer-autismus-spektrum-storung-brechen-das-studium-haufiger-ab#respond Tue, 12 Nov 2024 15:24:53 +0000 /alma-georges?p=21286 Pour de nombreuses personnes sur le spectre de l’autisme, les études supérieures ressemblent à un parcours du combattant. Comment leur rendre la vie académique plus aisée? Interview croisée de Ronnie Gundelfinger et Nicolas Ruffieux, co-organisateurs du symposium «Autisme et hautes études», qui se tiendra le 23 novembre à l’Unifr.

Was ist besonders bei der Hochschulbildung, wenn man eine Autismus-Spektrum-Störung hat?
Ronnie Gundelfinger (RG): Hier sollte man zwei Bereiche unterscheiden, die das Studium für Menschen mit einer Autismus-Spektrum-Störung erschweren können. Der eine Bereich hat direkt mit dem Studium zu tun: Studierende können zwar die Fächer selber wählen, was eine Erleichterung ist. Aber es ist ein ganz anderes System, sie müssen sich selber organisieren, es ist nicht mehr wie in der Schule, wo man weiss, wann und wo man sein muss. Die Studierenden müssen Wichtiges von weniger Wichtigem unterscheiden können, es gibt eine ganz neue Art von Prüfungen, etc. Dann gibt es auch neue Rahmenbedingungen. Der Anfang an einer Hochschule ist oft mit einem neuen Wohnort verbunden, neue Reisewege dorthin. Dazu kommt noch die Situation der Universität mit vielen Leuten auf einem engen Raum. Diese Punkte, die im Alltag sonst schon schwierig sind, werden mit dem Eintritt in die Universität noch verstärkt. Neurotypische Menschen waren oft an Orten mit vielen Leuten, an Partys, Konzerten oder Fussballspielen. Autistische Menschen haben diese Situationen, wenn möglich, vermieden.

Nicolas Ruffieux (NR): Ce que l’on peut ajouter, c’est que les personnes qui présentent un trouble du spectre de l’autisme (TSA) sont souvent attirées par les études supérieures en raison de leurs intérêts spécifiques et de leurs bonnes compétences académiques. Mais ce cadre académique plus ouvert, plus libre – qui est plutôt apprécié par la majorité des étudiant·e·s – est un vrai challenge pour elles, car il sollicite beaucoup plus ce qu’on appelle les fonctions exécutives: auto-organisation, flexibilité, planification. Autant de domaines dans lesquels les étudiant·e·s avec un TSA ne sont pas toujours très à l’aise. C’est aussi ce qui explique qu’ils et elles sont plus à risque d’échec que leurs camarades neurotypiques, ce malgré de bonnes compétences académiques. Mais il faut faire attention de ne pas généraliser: les études supérieures se passent parfois très bien pour les personnes avec un TSA.

Retrouve-t-on dans certaines branches davantage d’étudiants avec un TSA que dans d’autres?
RG: Viele Menschen auf dem Spektrum fühlen sich zu naturwissenschaftlichen Fächern hingezogen. Es gibt ein grosses Interesse für MINT Fächer und für Computer Sciences. Aber nicht nur und das ist wichtig. Ich kenne eine junge Frau mit Autismus, die Medizin studiert; ihr wurde immer wieder gesagt, autistische Menschen können nicht Medizin studieren. Das stimmt so einfach nicht, eigentlich sollten alle Fächer in Frage kommen.

NR: Il est vrai que ce genre de commentaire ne motive pas les étudiant·e·s avec un TSA à s’annoncer en tant que tel·le·s lors de leur inscription dans une haute école. Certes, de plus en plus le font afin de pouvoir bénéficier d’aménagements pédagogiques. Mais il y en a probablement beaucoup qui connaissent leur diagnostic et choisissent de ne pas s’annoncer par peur des réactions, de la stigmatisation. Une grande méconnaissance règne dans le grand public, notamment parmi les enseignant·e·s, le personnel administratif et les autres étudiant·e·s.

Welche Auswirkungen hat es auf die akademische Laufbahn, auf dem Spektrum zu sein?
NR: Même s’il manque de données scientifiques pour étayer cela, ces personnes semblent plus à risque d’échec prématuré que leurs pairs. Ce que relèvent souvent ces étudiant·e·s, ce sont des difficultés à gérer les transitions – notamment les changements d’un cours à l’autre -, les attentes divergentes des enseignant·e·s, l’intégration des consignes, les travaux de groupe, les relations sociales. Le traitement des informations sensorielles dans les grands auditoires est également un défi. Maintenir un degré élevé de concentration sur une journée complète de cours peut alors devenir très énergivore. Une piste d’intervention se situe d’ailleurs au niveau de l’aménagement individuel des lieux de cours. A l’Unifr, des salles sensoriellement calmes ont été conçues afin de permettre aux personnes avec un TSA de recharger leurs «batteries». Autant de mesures qui peuvent contribuer à éviter que des étudiant·e·s n’interrompent leur cursus non pas à cause du contenu des cours mais pour des raisons externes. Ce qui serait une perte pour eux·elles-mêmes et pour l’université. Mais aussi pour la société, puisqu’on sait qu’avoir un diplôme est un facteur prédictif important pour l’employabilité et, par ricochet, pour la vie autonome.

RG: Ich würde auch vermuten, dass Studierende mit einer Spektrum-Störung häufiger das Studium abbrechen, weil es ihnen einfach zu viel wird. Manchmal wechseln sie die Studienrichtung. Oft gehen die Probleme nach dem Studium weiter: wenn sie eine Stelle suchen, sind neue Sozialkompetenzen gefragt, damit sie sich überhaupt bewerben können. Studien zeigen, dass viele Menschen auf dem Spektrum im Beruf oft unter ihrem Ausbildungsniveau beschäftigt sind.

Quels sont les droits de ces étudiant·e·s?
NR: Dès le début des études, ils et elles ont la possibilité de s’annoncer auprès du bureau études et handicap, présent dans la plupart des institutions d’études supérieures. C’est une démarche essentielle à l’obtention de mesures d’aménagements pédagogiques. Attention, je ne dis pas qu’il faut absolument s’annoncer; dans certains cas, ce n’est peut-être pas pertinent. Reste que cette démarche a des avantages certains, notamment de rendre plus facile la communication avec les enseignant·e·s, avec d’autres étudiant·e·s, etc. De façon plus générale, les hautes écoles ont l’obligation légale de mettre en place des environnements d’apprentissage qui permettent à tous·tes les étudiant·e·s d’atteindre leur plein potentiel académique. Des encouragements en ce sens transparaissent dans différents textes de lois et réglementations, notamment le rapport du conseil fédéral sur l’autisme (2018) ou la Loi fédérale sur l’encouragement des hautes écoles et la coordination dans le domaine suisse des hautes écoles (2011). Sur le terrain, on constate parfois des frictions quant à la manière adéquate de procéder.

RG: Daher ist es wichtig, dass die Philosophie der Inklusion von Neurodiversität ganz oben in der Hierarchie der Institutionen präsent ist und auf klare Weise kommuniziert wird…

Lorsqu’un·e étudiant·e s’annonce en tant que personne TSA – et peut le prouver à l’aide d’un diagnostic reconnu – que se passe-t-il concrètement?
NR: Tout d’abord, ses besoins spécifiques vont faire l’objet d’une analyse. Il est utile pour cela de pouvoir s’appuyer sur l’attestation fournie par le ou la spécialiste qui s’est chargé·e du diagnostic. Pour certain·e·s étudiant·e·s, c’est le côté sensoriel qui pose problème, par exemple passer ses examens en même temps que 200 autres personnes dans une salle bruyante. Peut-être est-il possible de mettre à leur disposition une salle séparée ou de leur donner le droit de porter un casque antibruit. Pour d’autres étudiant·e·s, il sera utile d’obtenir la documentation en amont des cours. A l’Unifr, les aménagements accordés peuvent varier d’une faculté à l’autre.

RG: Darum ist es so wichtig, was von oben kommt. Es braucht wirklich von den Universitätsleitungen nicht nur eine Absichtserklärung, sondern ein echtes Engagement. Wenn es von oben her klar kommuniziert wird, können sich Studierende auch wehren, wenn sie an einer gewissen Fakultät nicht die Hilfe bekommen, die sie brauchen. Aber da gibt es noch grosse Unterschiede zwischen der Universitäten.

NR: Le pas supplémentaire serait de dépasser la vision de compensation pour se diriger vers une perception de la neurodiversité comme une norme académique enrichissante. Autrement dit, mettre en avant les plus-values de l’inclusion de ces étudiant·e·s, ce qu’ils et elles amènent – notamment au niveau du potentiel d’innovation – plutôt que ce qu’on doit leur mettre à disposition.

Könnten Hochschulen dies als «Verkaufsargument» nutzen?
RG: Es ist kein Zufall, dass unsere Tagung in Freiburg stattfindet. Als ich einen passenden Ort für diesen Anlass gesucht habe, hat man mir gesagt, “Schaue dir mal die Unifr an, dort sind sie ein Stück weiter”. Ich denke, wenn die Unifr aktiv über ihr Engagement für Inklusivität kommunizieren würde, wäre es schon ein «Verkaufsargument». Google macht es ja auch.

Ronnie Gundelfinger vient de dire que l’Unifr n’a pas été choisie par hasard pour accueillir le symposium «Autisme et hautes études». En quoi l’alma mater fribourgeoise se distingue-t-elle?
NR: Il y a 5 ans, nous avons lancé le projet de plateforme «autism&uni». Principalement développé par Nathalie Quartenoud (ndlr: du Département de pédagogie spécialisée de l’Unifr) et financé par le Fonds d’innovation de l’Unifr, cet outil a été mis en ligne en 2021. On y trouve des informations générales et pratiques, destinées à la fois aux étudiant·e·s avec un TSA, aux autres étudiant·e·s et au personnel de l’Unifr. A partir de là, différentes initiatives ont pris forme. Un programme de coaching individualisé, visant à soutenir l’autodétermination des personnes concernées, a vu le jour grâce au soutien du Pool de recherche de l’Unifr. Citons encore le lancement d’un programme de mentorat par les pairs, de groupes de parole, ainsi que d’une série de podcasts. Sans oublier non plus les deux salles sensoriellement calmes déjà évoquées. Mais ce n’est qu’un début.

Eben, welche anderen Einrichtungen können sich als sinnvoll erweisen?
RG: Ein Bereich, den ich sehr wichtig finde, ist die Möglichkeit, online zu studieren. Während der Covid-Pandemie haben das alle Hochschulen, mehr oder weniger gut, hingekriegt. Online Vorlesungen zu hören, vermeidet die grossen Ablenkungsfaktoren (viele Leute, grosse Säle, etc.). Die Studierenden können den Unterricht flexibler, nach dem eigenen Tagesrythmus, organisieren. Zum Beispiel eine herausfordernde Vorlesung nicht gerade am späten Nachmittag hören, wenn sie schon erschöpft sind. Es kommt noch dazu, dass die Vorlesungen für Menschen mit Autismus oft zu schnell sind. Visuell sind sie sehr gut, aber akustisch kann es für sie schwierig sein. Online Kurse können sie zwei- oder dreimal anhören, bis sie alle Details verstanden haben. Es wäre eine entscheidende Möglichkeit, um diesen Personen das Leben zu erleichtern. Aber im Moment sind noch nicht alle Unis dafür technisch ausgerüstet.

NR: Une approche additionnelle est d’apporter un soin particulier aux transitions, qu’elles se situent en amont ou en aval des études. Certaines institutions proposent ainsi des semaines ou des jours d’accueil avant la rentrée académique afin d’expliquer les modalités d’inscription aux cours, le fonctionnement général des études, etc. En fin de cursus, on peut faciliter la transition vers le marché de l’emploi, notamment en organisant des activités extra-académiques du type rédaction de CV ou préparation aux entretiens d’embauche. A l’Unifr, certaines offres vont déjà dans ce sens, notamment la «neurodiversity hour» du début de semestre. A noter qu’à l’inverse, le «one size fits all» ne fonctionne généralement pas bien pour cette population d’étudiant·e·s.

Est-ce que des aménagements plus tôt dans le parcours scolaire pourraient également avoir un impact positif?
RG: Wenn man im Schulbereich etwas für autistische Menschen machen wollte, müsste man in der Schweiz die Maturitätsverordnung ändern. In vielen Ländern, vor allem den englischsprachigen, können Schüler_innen sich schon früh auf ein paar wenige Fächer konzentrieren. Sie müssen nicht bis zum Schluss x Fächer studieren und dann vielleicht scheitern, einfach weil sie nicht sprachbegabt sind, obwohl sie sehr gut für Physik, Chemie und Mathematik talentiert wären. In diesem Fall kommt man in der Schweiz nicht zur Matura. Unser System ist in diesem Sinn nicht sehr autismusfreundlich. Aber das wäre eine riesige Veränderung und ist im Moment wahrscheinlich kein Thema. Flexibilität ist immer wieder das Stichwort.

NR: Il peut aussi être intéressant de travailler – en amont de l’entrée dans le cursus supérieur – sur le développement des personnes avec un TSA: connaissance d’elles-mêmes – points forts, points faibles – mais aussi connaissance de leurs droits. Cet aspect est très important pour la progression vers l’autodétermination, pour faire avancer elles-mêmes leur propre parcours. Beaucoup de jeunes – et notamment de jeunes femmes – ne sont pas diagnostiqué·e·s et donc, une fois arrivé·e·s aux portes de l’université, n’ont même pas la possibilité d’annoncer leur neurodiversité. D’autres, alors même qu’ils ou elles connaissent leur profil, n’ont pas suffisamment accès aux ressources à disposition, que soient des informations, des spécialistes ou des réseaux tels qu’Autisme Suisse ou, ici dans le canton, Autisme Fribourg. Et puis, de façon plus large mais tout aussi importante: il reste de gros stéréotypes à déconstruire au niveau de la société.

Un symposium inédit et bilingue à l’Unifr

Malgré de bonnes compétences académiques, les étudiant·e·s sur le spectre de l’autisme présentent en moyenne un risque plus élevé d’arrêt prématuré dans l’enseignement supérieur. Cette réalité a, par ricochet, un impact sur l’emploi et pose des questions d’ordre éthique. Alors qu’un soutien adéquat pourrait atténuer ce phénomène, la recherche spécifique présente encore des lacunes. C’est pourquoi le Département de pédagogie spécialisée de l’Unifr et l’association Autisme Suisse ont décidé d’organiser un consacré au thème «Autisme et hautes études». Cet évènement bilingue et hybride (présentiel et online), qui se tiendra sur le Campus de Pérolles le 23 novembre, vise aussi bien les personnes concernées que leurs proches, ainsi que les professionnels.

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  • (RG) ist Kinder- und Jugendpsychiater. Von 2004 bis 2019 leitete er die Fachstelle Autismus der Klinik für Kinder- und Jugendpsychiatrie und Psychotherapie der Psychiatrischen Universitätsklinik Zürich (KJPP).
  • Nicolas Ruffieux est professeur ordinaire au Département de pédagogie spécialisée de l’Unifr. Il est notamment responsable du Bachelor en pédagogie curative clinique et éducation spécialisée

 

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Déficience intellectuelle: vers plus d’inclusion? /alma-georges/articles/2023/deficience-intellectuelle-vers-plus-dinclusion /alma-georges/articles/2023/deficience-intellectuelle-vers-plus-dinclusion#respond Fri, 02 Jun 2023 11:57:58 +0000 /alma-georges?p=18297 Elargir l’accès aux droits politiques pour les personnes présentant une déficience intellectuelle et leur donner les moyens de se forger une opinion. C’était l’un des points abordés lors du congrès DUO à Fribourg, organisé pour et par les personnes concernées.

Imaginez que l’on vous retire vos droits politiques en raison d’une mauvaise compréhension d’un objet de vote. Exagéré? C’est pourtant la crainte que peuvent ressentir les citoyen·ne·s présentant une déficience cognitive. «Certaines de ces personnes ressentent la peur de se tromper, de ne pas comprendre et de devoir se justifier. Leur auto-estime est souvent déficitaire», relève la Dre Barbara Fontana-Lana. Maîtresse d’enseignement et de recherche au Département de pédagogie spécialisée de l’Université de Fribourg, elle a mené avec ses collègues une recherche sur la participation politique des personnes ayant une déficience intellectuelle (DI). Cette recherche (Vote4All), menée par étapes, analyse la législation fédérale et celle des cantons, leur application ainsi que les différents facilitateurs et obstacles.

Dans l’arène politique
En Suisse, la loi fédérale sur les droits politiques, s’appuyant sur l’article 136 de la Constitution, exclut du droit de vote «les personnes qui, en raison d’une incapacité durable de discernement, sont protégées par une curatelle de portée générale ou par un mandat pour cause d’inaptitude». Une disposition en contradiction avec la convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, texte pourtant ratifié par la Suisse en 2014. Reste que les lignes bougent. A Genève, l’incapacité de discernement n’est plus un critère de retrait des droits politiques. Et à l’échelon national, le Conseil fédéral doit répondre, d’ici juin 2023, au postulat de la conseillère aux Etats Marina Carobbio Guscetti. Son texte demande la pleine participation politique des personnes présentant une DI, à l’image des engagements pris par des pays comme la France, l’Italie, l’Autriche ou encore l’Espagne.
Avoir le droit de vote est une chose, mais pouvoir pleinement voter en connaissance de cause en est une autre. Aujourd’hui, les personnes présentant une DI et qui peuvent voter butent souvent sur des obstacles, comme l’absence d’informations adaptées et compréhensibles. «On rencontre encore beaucoup de méconnaissance sur la déficience intellectuelle. Il en existe de différentes sortes et l’on oublie que ce n’est pas le type de déficience qui fait la différence, mais le type de soutien», souligne Barbara Fontana-Lana.

Causes multiples
La chercheuse pointe plusieurs stéréotypes. D’abord, la croyance encore tenace que la DI est majoritairement héréditaire. «Il s’agit d’un héritage des théories eugénistes des siècles précédents. C’est vrai pour seulement 5 à 10% des cas. En fait, les causes de l’origine d’une DI peuvent être variées: anténatales (par ex. alcoolisme maternel ou utilisation de drogues, problème génétique), périnatales (manque d’oxygène au moment de la naissance) et post natales (maladie, manque de soins adaptés et de stimulations, etc.).» Barbara Fontana-Lana déplore également une vision par trop «statique» de l’intelligence. «La société tend à considérer la DI comme peu évolutive. Or aujourd’hui plus personne ne nie la plasticité cérébrale. On apprend tout au long de la vie et ce qui est valable pour tout un chacun l’est aussi pour ces personnes», fait-elle remarquer. Apprendre revient à s’impliquer, à participer. Cela passe par des espaces de paroles. A l’image de DUO, un congrès qui s’est tenu pour la première fois début 2023 à Fribourg. Une démarche originale portée par le Centre de formation continue (CFC), le Département de pédagogie spécialisée de l’Université de Fribourg, la Haute école de travail social de Fribourg et l’association Vivre son deuil Suisse. Cette journée était organisée pour et par les personnes présentant une déficience cognitive.

Les outils existent
«Aujourd’hui, on fait beaucoup pour les professionnel·le·s, mais trop peu pour les personnes directement concernées», relève Jean-François Massy, directeur du CFC. Cette rencontre, une première à Fribourg, a été un succès. «L’espace de parole qui s’est ouvert a été investi très rapidement», observe Barbara Fontana-Lana. «Cela répondait à un besoin de partager avec d’autres personnes présentant une DI», ajoute Jean-François Massy. De par leurs caractères sensibles, les sujets abordés ont parfois fait émerger les manques affectifs que peuvent ressentir ces personnes ainsi que «le sentiment que la société pourrait faire un peu plus pour elles». Jean-François Massy nuance pourtant : «C’est une réalité, mais il ne faudrait pas avoir l’image d’une population enfermée dans la souffrance. Dans nos cours, on croise plein de gens heureux!» Entre le congrès DUO et les différents ateliers que propose le CFC, Barbara Fontana-Lana décèle un fil rouge: l’accessibilité des informations. «On se dit que ces personnes devraient avoir accès à n’importe quel congrès, mais elles butent souvent sur le langage utilisé et le manque de didactique, frein à la compréhension. Pourtant, les outils et les connaissances scientifiques nous permettant de proposer des didactiques adaptées existent.»

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Prêter l’oreille à l’autisme #4 – L’apprentissage /alma-georges/articles/2022/preter-loreille-a-lautisme-4-lapprentissage /alma-georges/articles/2022/preter-loreille-a-lautisme-4-lapprentissage#respond Wed, 22 Jun 2022 06:48:07 +0000 /alma-georges?p=16094 Au moins 1% de la population se trouve sur le spectre de l’autisme. Et vous, qu’en savez-vous? Ce podcast en quatre épisodes nous donnent à entendre et à comprendre le monde de l’autisme. Ce quatrième et dernier volet fait le point sur les différents aspects abordés précédemment et montrent comment ils s’entremêlent dans le cadre de l’apprentissage.

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Prêter l’oreille à l’autisme #3 – Le domino sensoriel /alma-georges/articles/2022/preter-loreille-a-lautisme-3-le-domino-sensoriel /alma-georges/articles/2022/preter-loreille-a-lautisme-3-le-domino-sensoriel#respond Wed, 15 Jun 2022 08:25:32 +0000 /alma-georges?p=16057 Au moins 1% de la population se trouve sur le spectre de l’autisme. Et vous, qu’en savez-vous? Ce podcast en quatre épisodes nous donnent à entendre et à comprendre le monde de l’autisme. Le troisième épisode de la série nous plonge dans la sensorialité. Comment s’articulent «l’autisme et le domino sensoriel»?

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Prêter l’oreille à l’autisme – Podcast #1 /alma-georges/articles/2022/preter-loreille-a-lautisme-podcast-1 /alma-georges/articles/2022/preter-loreille-a-lautisme-podcast-1#respond Wed, 01 Jun 2022 07:52:31 +0000 /alma-georges?p=15914 Au moins 1% de la population se trouve sur le spectre de l’autisme. Et vous, qu’en savez-vous? Ce podcast en quatre épisodes nous donnent à entendre et à comprendre le monde de l’autisme. Dans ce premier épisode, on s’interroge «C’est quoi l’autisme? Ce qu’on a appris depuis Rain Man».

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Une question de représentations /alma-georges/articles/2022/une-question-de-representations /alma-georges/articles/2022/une-question-de-representations#respond Mon, 30 May 2022 08:13:41 +0000 /alma-georges?p=15894 La façon dont on perçoit certaines questions dépend du regard que la société ou les médias nous proposent. Analyser le rôle que jouent les médias dans la représentation sociale du handicap chez les enfants ou observer quelles sont les représentations sur la sexualité des femmes avec déficience intellectuelle: deux mémoires de bachelor en pédagogie spécialisée à l’Unifr ont fait l’objet de publications dans la revue d’information sociale REISO.

Will est un garçon de 9 ans en fauteuil roulant. Chaque semaine, une chaîne TV grand public française diffuse les aventures de cet enfant sous forme de capsules animées. Deux éléments distinguent le jeune héros des autres personnages en situation de handicap qui apparaissent généralement sur le petit ou le grand écran: Will n’est ni un «super-handicapé» aux pouvoirs quasi magiques, ni, à l’inverse, une caricature ambulante. Il s’agit d’un enfant bien dans son corps et dans sa tête, qui fait les 400 coups avec ses copains.

«Globalement, il y a peu de séries et de films montrant des personnages en situation de handicap; lorsque c’est le cas, la présence du handicap est souvent mise en avant et surfaite», constate Chloé Jaccard. Cette étudiante – qui a réalisé son travail de bachelor en pédagogie spécialisée à l’Unifr sous la direction de Sophie Torrent – cite l’exemple des séries dans lesquelles un autiste brillantissime aide la police à résoudre des énigmes ultra-compliquées.

«J’ai eu l’occasion de travailler avec des jeunes en situation de handicap et j’ai constaté qu’ils ont tendance à s’identifier aux héros ‹beaux et valides›, qu’ils se reconnaissaient très peu dans les personnages en situation de handicap.» Parallèlement, l’étudiante a observé qu’à une époque où l’accent est mis sur l’inclusion scolaire, «il manque encore cruellement de travaux sur les représentations sociales des personnes en situation de handicap». D’où l’idée de consacrer son mémoire de bachelor à cette thématique.

Petits moyens, grands effets
«Plus il est rare d’expérimenter le sujet social dans son quotidien, plus l’influence des médias est grande», rappelle Chloé Jaccard, citant la littérature spécialisée. C’est d’autant plus le cas chez les enfants, dont ils constituent la principale source de connaissances. L’objectif de la jeune chercheuse était d’analyser l’effet de la projection de Will sur les représentations sociales des enfants. Menée sur septante élèves vaudois âgés de 8 à 10 ans, l’étude a eu recours à la technique de l’association libre et de l’évocation hiérarchisée. Les écolières et écoliers ont ainsi dû associer cinq mots au terme «personne handicapée en chaise roulante», puis les classer par ordre d’importance. Ils ont ensuite visionné le dessin animé durant dix semaines en classe, période au terme de laquelle une nouvelle récolte de données a eu lieu.

Après avoir analysé l’ensemble des réponses, Chloé Jaccard s’est rendu compte que certains éléments avaient résisté au changement. «Il s’agit des termes ‹triste›, ‹gentil› et ‹pas de chance›, qui constituent alors le noyau dur de la représentation sociale du handicap», écrit-elle dans un article publié par la revue d’information sociale REISO. A l’inverse, le terme «aide» a été très peu comptabilisé durant la deuxième récolte de données. On peut donc imaginer que «la manière spécifique dont Will est mis en scène propose une image différente du handicap, une image en dehors des concepts de dépendance et d’assistance qui lui sont généralement associés».

Il semblerait donc que le dessin animé ait lancé un processus de réflexion chez les enfants concernés. «Ce constat est réjouissant, car il montre que non seulement il est possible de faire évoluer les représentations sociales, mais surtout qu’on n’a pas forcément besoin de grands moyens pour le faire!» Reste que si l’on souhaite avoir recours à cette méthode pour améliorer l’intégration d’un élève en situation de handicap dans une classe, «il faut travailler en amont, bien avant l’arrivée de l’élève». En effet, les stéréotypes ont la vie dure, «même chez les enfants», fait remarquer Chloé Jaccard.

Discours axé sur les conséquences négatives
Tout comme Chloé Jaccard, Lisa Genoud a écrit son mémoire de Bachelor en pédagogie spécialisée sous la direction de Sophie Torrent. Son travail a lui aussi fait l’objet d’une publication dans la revue REISO. Mais les similitudes entre les deux recherches s’arrêtent là: côté thématique, Lisa Genoud s’est penchée sur les représentations sur la sexualité des femmes avec déficience intellectuelle. «Une revue de la littérature existante sur le sujet m’a confirmé qu’il s’agit d’un sujet d’actualité, qui fait néanmoins l’objet de nombreux tabous», précise l’étudiante de l’Unifr.

Le travail de la jeune chercheuse, qui a été récompensé par le prix SEHP de l’association SExualité et Handicaps Pluriels, met le doigt sur le fait que les femmes avec déficience intellectuelle sont confrontées à une double discrimination. D’une part, «elles souffrent de stéréotypes réduisant encore trop souvent la sexualité féminine à la pureté, la protection et la prévention». Par ailleurs, «elles doivent faire face aux représentations culturelles associant négativement les femmes en situation de handicap à des limitations importantes altérant leur fonctionnement».

Pour dresser un portrait actuel de la réalité vécue par ces femmes, et rendre compte des représentations qu’elles se font de leur sexualité, Lisa Genoud a eu recours à 17 études menées récemment. «L’analyse de ces recherches montre que les femmes avec déficience intellectuelle possèdent généralement peu de connaissances sur la sexualité; leurs discours sur leur comportement sexuel reposent sur la prévention des conséquences négatives comme les infections sexuellement transmissibles, une grossesse non désirée ou des abus.» La revue de la littérature menée par l’étudiante révèle en outre que l’accès aux expériences sexuelles reste globalement très limité pour la plupart des femmes concernées. Cette situation s’explique par leur dépendance à leurs parents pour obtenir l’autorisation de voir quelqu’un.

Soutenir l’autodétermination
«J’avoue que je ne m’attendais pas, avant d’entreprendre mes travaux, à tomber sur des représentations aussi négatives de leur sexualité par les principales intéressées», commente Lisa Genoud. De même, la chercheuse a été surprise «par la peur qui semble liée à la sexualité de ces femmes». Et, dans la foulée, «à une absence assez généralisée de la notion de plaisir» dans le discours autour de cette sexualité. «Je suppose que ce phénomène découle du fait que l’accent est systématiquement mis sur la prévention, ce qui attise l’anxiété tout en étouffant le plaisir.» Or, la définition de la santé sexuelle émise par l’OMS en 2012 dépasse la seule absence de trouble et inclut le plaisir, rappelle-t-elle.

Quelles pistes pourrait-on explorer afin de combler les lacunes relevées dans le mémoire de bachelor de Lisa Genoud? «Avant tout, il faut encourager et soutenir l’autodétermination des femmes avec déficience intellectuelle en matière de sexualité, répond l’étudiante. Cela passe notamment par l’information.» Dans ce contexte, l’éducation sexuelle a un grand rôle à jouer. «Mais attention, celle-ci doit se poursuivre au-delà de la scolarité, avec des informations accessibles… et adaptées.» La chercheuse va plus loin: la formation doit aussi concerner les personnes qui accompagnent ces femmes. «Le milieu de l’éducation spécialisée n’est – de loin – pas épargné par les tabous autour de la sexualité des personnes en situation de handicap.»

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  • Chloé Jaccard prépare un Master en travail social à l’Unifr. Elle est titulaire d’un Bachelor en pédagogie spécialisée.
    Plus d’informations sur son travail et lien vers l’article de la revue REISO.
  • Lisa Genoud prépare un Master en enseignement spécialisé à l’Unifr. Elle est titulaire d’un Bachelor en pédagogie spécialisée.
    Plus d’informations sur son travail et lien vers l’article de la revue REISO.
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Du projet estudiantin à la plate-forme innovante /alma-georges/articles/2022/du-projet-estudiantin-a-la-plate-forme-innovante /alma-georges/articles/2022/du-projet-estudiantin-a-la-plate-forme-innovante#respond Wed, 23 Mar 2022 08:04:53 +0000 /alma-georges?p=15498 Depuis peu, les institutions spécialisées pour adultes du Canton de Fribourg disposent d’une plateforme de présentation de leurs prestations: infri-guide.ch. Un travail d’étudiant·e·s de l’Unifr est à l’origine de cet outil innovant.

S’ancrer dans la réalité pour donner du sens aux travaux d’étudiant·e·s. Une maxime qui existe de longue date dans les branches et les instituts techniques et qui apparaît désormais aussi dans les sciences humaines. La preuve: une plate-forme internet présentant les prestations des institutions spécialisées pour adultes du Canton de Fribourg, , mise au point grâce à un partenariat entre des étudiant·e·s du Département de pédagogie spécialisée et l’organisation faîtières des institutions ().

«A la base, notre projet était fictif, explique Lisa Genoud, l’une des quatre étudiant·e·s impliqué·e·s. Nous avions imaginé un site internet permettant aux jeunes Valaisans sortant d’une école spécialisée de s’informer sur les possibilités qui s’offraient à eux pour la suite.»

Lors de la défense de ce projet, réalisé en groupe dans le cadre d’un cours sur le travail d’équipe durant le cursus du Bachelor en pédagogie spécialisée, Stéphane Renz, directeur de L’Estampille, à Fribourg, officie comme expert externe. Il se rend tout de suite compte que l’outil proposé répond à un besoin bien réel dans le Canton de Fribourg.

Orianne van den Driessche, Elena Lüthi, Lisa Genoud et Benoît Dubuis ont pu concrétiser leur projet au service des institutions spécialisées du Canton.

Un mandat à la clé
Au vu de son intérêt, l’enseignante Nathalie Quartenoud Marcherel suggère à Stéphane Renz d’amener le projet devant le Comité d’Infri, organisation faîtière des institutions spécialisées fribourgeoises dont fait partie L’Estampille. En parallèle, l’enseignante recontacte également le groupe d’étudiant·e·s afin de savoir qui serait intéressé·e à aller de l’avant au cas où une implémentation réelle de leur projet pouvait voir le jour.

Quatre des sept membres du groupe de travail sont partant·e·s. Une première rencontre est organisée, à la suite de laquelle Infri élabore une proposition concrète, avec un cahier des charge qui co-défini. «On a dû présenter un budget, définir les étapes du projet, le temps nécessaire pour les réaliser… Ce n’était pas évident», se rappelle Elena Lüthi, une autre étudiante.

Elément clé de leur mission: élaborer un questionnaire qui permettent de réunir les informations sur les différentes institutions. «Il s’agissait de connaître les prestations offertes, mais aussi d’uniformiser leur désignation et d’harmoniser les terminologies», détaillent Orianne van den Driessche et Benoît Dubuis, les deux autres étudiant·e·s impliqué·e·s.

«On nous a pris au sérieux»
«Notre enseignante nous a beaucoup soutenu·e·s dans cette phase pour qu’elle s’inscrive dans une démarche scientifique», ajoutent-ils. La pause estivale de 2019 est consacrée aux visites des institutions et à la constitution d’une base de données.

Les étudiant·e·s prennent ensuite part aux différentes réunions, notamment celles avec les informaticien·ne·s et les graphistes, qui ont mené à la création de la plate-forme internet. «C’était assez dingue de mener un tel projet alors que nous étions étudiant·e·s en bachelor, se rappellent-ils. Les professionnel·le·s avec qui nous collaborions nous ont pris au sérieux. Nos avis ont été considérés.»

Plate-forme interactive
Alors qu’il ne devait durer qu’un an, le projet en a pris presque trois pour se concrétiser. La faute à la pandémie de covid, venue freiner les échanges, mais pas que: «Nous avions probablement sous-estimé la complexité de créer une plate-forme interactive», relève Benoît Dubuis.

Afin de répondre aux besoins de son public cible, le site internet a été conçu pour s’adapter au profil de la personne qui le consulte. «Il s’agit de la guider dans ce catalogue de prestations, souligne Lisa Genoud. Notre objectif était que les jeunes — et leur famille aussi — connaissent toutes les possibilités offertes dans le Canton et qu’ils ne choisissent pas seulement en fonction de là où une place était libre.»

Afin d’être accessibles au plus grand nombre, infri-guide.ch a été traduit en langage simplifié, sous la houlette de Catherine Charpie de Pro Infirmis. Avant sa mise en ligne en février, cet outil innovant a été testé par des personnes en situation de handicap. «Reste à attendre les retours du terrain», notent les quatre étudiant·e·s, qui se sont désormais éloigné·e·s du projet pour poursuivre leur cursus en master.

Donner du sens permet de motiver

Nathalie Quartenoud, collaboratrice scientifique au Département de pédagogie spécialisée

Le travail de groupe, qui a mené à la plate-forme www.infri-guide.ch, a servi de détonateur dans les pratiques du Département de pédagogie spécialisée. «Nous avons pérennisé le fait de proposer des projets concrets, en partenariat avec des institutions locales, relève Nathalie Quartenoud Macherel. Les étudiant·e·s étaient très demandeurs·euses de cette approche du terrain et les institutions nous sollicitaient aussi régulièrement pour créer des liens.»

La collaboration avec l’organisation faîtière Infri pour ce premier projet a aussi permis d’instaurer un rapport de confiance mutuelle. «Ce partenariat a été exemplaire, note l’enseignante. Les étudiant·e·s ont été mis au centre du projet. Ils n’ont pas été juste des petites mains à qui l’on aurait demandé d’effectuer le travail ingrat. Les directions des institutions se sont beaucoup impliquées et les compétences de chacun·e ont profité à toutes et tous.»

L’enseignante s’est trouvé rassurée dans le rôle de l’institution universitaire: «On a tendance à nous enfermer dans une enveloppe académique. Ce genre de projets nous montre que la vision des un·e·s et des autres peut être très complémentaire. On entre dans quelque chose qui a du sens. Le savoir est directement utile et utilisé. C’est stimulant!»

Dynamique positive
Un troisième projet lié au cours du travail d’équipe vient d’être lancé, en partenariat avec La Colombière, à Misery. «Il n’a pas une portée aussi large que la plate-forme infri-guide.ch, glisse Nathalie Quartenoud Macherel. Mais, pour les étudiant·e·s, partir d’un besoin concret pour imaginer une solution ancre l’apprentissage de la gestion de projet.»

Pour convaincre les nouvelles et nouveaux venu·e·s, les quatre étudiant·e·s qui ont travaillé pour infri-guide.ch ont réalisé une vidéo. Ils y présentent leur projet, y détaillent les défis à relever ainsi que les bénéfices qu’ils ont tiré de cette expérience. «Donner un sens à nos travaux crée une dynamique très positive!»

Quant aux institutions, elles apprécient la fraîcheur de regard et de proposition des étudiant·e·s.

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«Elle pleurait de joie. Et nous aussi!» /alma-georges/articles/2021/__trashed-3 /alma-georges/articles/2021/__trashed-3#respond Mon, 13 Sep 2021 12:04:54 +0000 /alma-georges?p=14318 Sarah, Laura et Justine, trois étudiantes en pédagogie spécialisée, ont participé au premier Camp Abilities de Suisse, un week-end sportif pour enfants malvoyants et aveugles. Bien plus qu’une expérience professionnelle, ça a été pour elles une leçon de vie.

A les entendre, on en ressort avec une conviction: Sarah, Laura et Justine ne se sont pas fourvoyées en choisissant d’étudier la pédagogie spécialisée. Quel enthousiasme elles dégagent! Bien que cela fasse plus de deux mois que le Camp Abilities de Lausanne a pris fin, elles ne peuvent en évoquer le souvenir sans des trémolos dans la voix. «Une des participantes a réussi à escalader un mur de 10 mètres. Elle pleurait de joie. Et nous aussi!», confie Laura. C’est certain: le week-end que nos étudiantes ont passé à Lausanne en compagnie de treize jeunes atteints de déficience visuelle restera à jamais gravé dans leur mémoire.

Ces enfants malvoyants ou aveugles découvrent les joies de l’escalade.

Sport et déficience visuelle
Il faut dire que la pratique du sport ne tend pas les bras aux près de 120 enfants malvoyants ou aveugles de Suisse romande. Deux éléments ressortent très clairement de la littérature scientifique concernant les enfants avec déficience visuelle et le sport.
Tout d’abord, en milieu scolaire, les enseignant·e·s d’éducation physique, faute de formation idoine, ne savent pas toujours comment intégrer les enfants malvoyants à leur classe. «Ceux-ci se retrouvent souvent sur le banc ou alors cantonnés à des rôles secondaires quand on ne les dispense pas purement et simplement d’activités sportives, sous prétexte que, dans le fond, le sport n’est pas si important», déplore Valérie Caron, instigatrice du Camp Abilities en Suisse.

En ce qui concerne le contexte extra-scolaire, le niveau d’activité physique des enfants malvoyants s’avère inférieur à celui des enfants voyants. Même si les chercheuses et chercheurs ne disposent pas d’un tableau précis pour la Suisse romande, il semblerait que l’inclusion des enfants malvoyants dans le sport y rencontre certains obstacles. «Plusieurs parents nous ont fait part de difficultés, explique la Docteure Valérie Caron, il peut par exemple s’avérer compliqué pour un enfant atteint de déficience visuelle d’intégrer le club de football de son village.»

Les moyens manquent, pas l’envie
D’où l’idée de Valérie Caron de créer un camp sportif, en Suisse, spécialement dédié aux enfants atteints de déficience visuelle: «J’ai importé en Suisse ce concept de Camp Abilities, qu’a inventé Lauren Lieberman en 1996 aux Etats-Unis. Il répond à cet immense besoin des enfants ayant des problèmes visuels de pratiquer des sports adaptés à leur handicap et d’avoir une vie sociale en contexte extra-scolaire et extra-familial.» Disposant de peu de moyens, Valérie Caron a pu compter sur l’appui de

Enfants et guides ont eu infiniment de plaisir durant le camp.

ses trois étudiantes, qui n’ont pas lésiné sur l’huile de coude: «Bien sûr, nous devons faire un stage pour obtenir des crédits, explique Sarah, mais ce n’était pas notre motivation principale. Plutôt que de rejoindre un projet déjà sur les rails, nous sommes fières d’avoir contribué à créer un camp de toutes pièces et, on l’espère, qui ne sera que le premier d’une longue série!» Elles ont ainsi choisi la voie ardue, car il leur a fallu trouver des fonds, recruter des entraîneurs et des guides. Tout sauf une sinécure car, en Suisse, personne ne maîtrise à la fois la problématique du handicap et la pédagogie.

Les enfants atteints de déficience visuelle sont souvent privés d’activités sportives.

 

«Le profil parfait n’existe pas! A la Haute Ecole Pédagogique, on suit au mieux un cours sur le déficit visuel, avec un powerpoint agrémenté de quelques diapositives», déplore Sarah. Mais qu’importe, quand on veut, on peut. Notre fine équipe du Département de pédagogie spécialisée a fini par choisir une série de sports – dont le judo, la natation, le yoga, l’escalade et le football – et, surtout, décidé de la meilleure manière de les adapter au degré de handicap de chaque participant·e. Le camp pouvait démarrer!

Treize enfants ont participé au premier Camp Abilities de Suisse.

Une expérience professionnelle et humaine
Les 15 et 16 juillet 2021, treize enfants sont venus à Lausanne pour cette première édition suisse du Camp Abilities. Malgré toutes les réflexions préalables, les éducatrices spécialisées en formation ont vite réalisé que rien ne valait la pratique: «Il y a plein de petits détails qui n’étaient pas parfaitement maîtrisés, concède Justine, comme au cours de judo où nous n’avions pas placé les tapis au bon endroit.» C’est en forgeant que l’on devient forgeron! Mais ce qui a sans doute le plus marqué nos étudiantes, c’est l’esprit d’équipe qui régnait durant ces deux jours de bonheur et de partage: «Tout le monde était très motivé, s’enthousiasme Laura, tout le monde tirait à la même corde, enfants comme adultes!» Et Sarah de renchérir: « Même au football, les garçons plus âgés levaient le pied quand ils jouaient avec des plus petits. Durant tout le camp, il y a eu une vraie solidarité et beaucoup de bienveillance.»
Valérie Caron et ses étudiantes souhaitent absolument reconduire l’expérience, afin d’en faire profiter tous les enfants malvoyants et aveugles de Suisse romande. «J’ai vraiment l’impression que les enfants qui ont participé au camp vont faire fonctionner le bouche à oreille», conclut Justine.

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  • Ce projet, alliant la pratique universitaire avec les acteurs de terrain du Centre pédagogie pour élèves handicapés de la vue de Lausanne, a été soutenu financièrement par la Fondation Asile des Aveugles.

L’équipe de Valérie Caron sera présente à avec un stand d’informations et un atelier de cécifoot.

Photos: Fondation Asile des Aveugles

 

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Bulles de sciences #3 – Les troubles du spectre autistique /alma-georges/articles/2021/bulles-de-sciences-3-les-troubles-du-spectre-autistique /alma-georges/articles/2021/bulles-de-sciences-3-les-troubles-du-spectre-autistique#respond Tue, 29 Jun 2021 08:40:09 +0000 /alma-georges?p=13972 «Bulles de sciences» nous emmène à la rencontre des gens qui font notre Université… en format BD! Ce troisième épisode, vous entraîne sur les traces de Nathalie Quartenoud, collaboratrice scientifique et spécialiste des troubles du spectre autistique.

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  • Nathalie Quartenoud est collaboratrice scientifique au Département de pédagogie spécialisée.
  • Le groupe de recherche Autism&Uni vient de lancer de soutien aux étudiant·e·s concernés par le TSA, un projet encore unique en Suisse et inexistant en français.
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