hydrogene – Alma & Georges /alma-georges Le magazine web de l'Université de Fribourg Thu, 12 Sep 2024 09:51:40 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.3.5 De la science à l’entrepreneuriat, l’innovation en action /alma-georges/articles/2024/de-la-science-a-lentrepreneuriat-linnovation-en-action /alma-georges/articles/2024/de-la-science-a-lentrepreneuriat-linnovation-en-action#respond Wed, 11 Sep 2024 09:02:36 +0000 /alma-georges?p=20806 Le laboratoire, voilà l’endroit où Timur Ashirov, post-doctorant au Département de chimie, se sent le plus dans son élément. Mais pour chercher des financements, le chercheur de l’Université de Fribourg a dû troquer sa blouse blanche contre un costard-cravate. Avec un succès certain, puisqu’il vient de décrocher un soutien de 150’000 francs de la Fondation Gebert Rüf.

Dans le monde passionnant et ultra-concurrentiel de la recherche, il ne suffit pas d’avoir une bonne idée pour voir affluer l’argent des bailleurs publics ou des investisseurs privés, encore faut-il savoir la vendre! Durant son doctorat, Timur Ashirov a mis au point une membrane innovante qui permet d’améliorer l’efficience des piles à hydrogène. Mais entre le jaillissement de l’idée et sa commercialisation, il y a ce que l’on nomme la «vallée de la mort», cette phase si critique où l’innovation, faute de financements et de soutien, périclite si souvent.

Une technologie prometteuse mais…
Pour réduire les émissions de dioxyde de carbone des véhicules traditionnels, beaucoup ne jurent plus que par l’hydrogène. Cette technologie a certes beaucoup de vertus, mais elle se voit encore plombée par plusieurs défauts majeurs: produire de l’hydrogène coûte cher et son stockage nécessite des infrastructures complexes et donc coûteuses. Sans compter que, dans le moteur des véhicules, les piles à combustible utilisent l’air ambiant, constitué à 78 % d’azote, pour la réaction électrochimique. Or, l’azote est un gaz inerte qui s’accumule au niveau de l’anode et réduit l’efficacité des piles. «Il faut alors les purger, ce qui provoque non seulement des pertes d’hydrogène, mais également une pollution, puisque la purge libère des gaz à effet de serre, explique Timur Ashirov. Ce à quoi il faut ajouter les pertes financières qui s’élèvent à près de 15’000 francs durant la dizaine d’années que dure chaque pile à combustible.»

Rencontre fortuite
Carburant à l’optimisme, le chimiste de l’Université de Fribourg en est pourtant convaincu: l’hydrogène reste une énergie d’avenir et connaîtra la même trajectoire que celle des véhicules électriques: «Avec les économies d’échelles, les coûts de production et de stockage vont baisser, c’est certain.» Quant à ce problème intrinsèque des piles à combustible, le chimiste l’a découvert par le plus grand des hasards: «Au cours de mon doctorat, j’ai mis au point une membrane qui permet de séparer les gaz. En présentant cette invention dans un salon, une personne travaillant pour Plastic Omnium, une entreprise spécialisée dans la mobilité durable, m’a fait part des limitations techniques des piles à combustible. Il m’a alors demandé si mon dispositif pouvait résoudre le problème. Nous avons décidé de faire des tests pour voir si ma solution avait du potentiel ou pas.» Et Timur Ashirov insiste sur le «nous», ses travaux étant un vrai travail d’équipe: «Sans le Professeur Ali Coskun, conseiller scientifique, Vincent Racciatti, directeur financier, et Olivier Graber, responsable du développement technique, rien de tout cela n’aurait été possible!»

Un viatique pour traverser le désert
Ces premiers tests, bien que concluants, prennent du temps et le temps c’est de l’argent. Timur Ashirov doit trouver les financements nécessaires. Pour parvenir à séduire les bailleurs de fonds et les investisseurs, il faut du bagout, de l’assurance et une apparence. «J’ai dû prendre des cours pour mieux communiquer, ralentir mon débit, trouver les mots pour parler aux investisseurs qui, venant de la finance, n’ont souvent aucune idée de nos problématiques scientifiques.» Un costume de démarcheur que Timur Ashirov a su endosser avec un succès certain: Separatic, sa start-up a déjà obtenu 50’000 francs de Venture Kick, 183’000 francs du Fonds national de la recherche scientifique et Innosuisse (BRIDGE Proof of Concept grant) et, dernièrement, un montant de150’000.- de la Fondation Gebert Rüf pour laquelle le chercheur a même dû passer devant la caméra. «Les bailleurs veulent s’assurer que nous puissions communiquer avec les médias et avec le grand public. Il faut donc se plier à certaines exigences auxquelles nous ne sommes a priori pas préparés». Son film de trois minutes et son dossier d’une cinquantaine de pages ont su convaincre le jury de la Fondation. «C’est un signal fort pour les investisseurs! Gebert Rüf place la barre si haut que seules quelques entreprises peuvent y prétendre.» Cette somme permettra de couvrir le salaire du chercheur tadjik, d’acquérir du matériel, et surtout, de passer du prototype de laboratoire aux tests auprès des partenaires industriels.

Sortie du désert et entrée sur le marché
En laboratoire, dans des conditions simulant le fonctionnement réel des piles à combustible, le prototype a livré des résultats convaincants. «Nous devons maintenant être certains que notre produit soit assez durable pour supporter 10’000 cycles, puisque les piles à combustible sont prévues pour durer 10 ans.» Timur Ashirov, qui bénéficie du soutien de la Haute Ecole l’ingénierie et d’architecture de Fribourg (HEIA) pour relever ce défi, a bon espoir d’y parvenir à l’automne 2025. Ce sera l’occasion de tester son prototype en conditions réelles. En cas de succès, ce serait la fin de la traversée du désert et l’arrivée dans un environnement florissant où pleuvent les billets verts: les expert·e·s estiment que le marché européen des piles à combustible devrait atteindre 10 milliards de dollars et le marché mondial 40 milliards de dollars d’ici 2030.

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Nouveau CAS dans le domaine de l’hydrogène /alma-georges/articles/2024/nouveau-cas-dans-le-domaine-de-lhydrogene /alma-georges/articles/2024/nouveau-cas-dans-le-domaine-de-lhydrogene#respond Wed, 06 Mar 2024 15:08:59 +0000 /alma-georges?p=19900 Il n’y a pas de solution miracle! Si la Suisse souhaite respecter ses engagements climatiques, elle doit fortement diminuer son empreinte carbone. A cet égard, l’hydrogène constitue une piste si prometteuse que l’HEIA-FR et l’Unifr se sont unies pour offrir un Certificate of Advanced ÌÇÐÄVolg (CAS) pour toute personne souhaitant déployer ce vecteur énergétique. Rencontre avec deux des chevilles ouvrières du projet, Jean-Nicolas Aebischer, directeur de l’HEIA-FR et Ali Çoskun, président du Département de chimie.

Comment a germé l’idée de créer un CAS hydrogène?
Jean-Nicolas Aebischer: Pour atteindre nos objectifs climatiques, nous savons que nous devons impérativement «décarboner» nos modes de vie. En ce sens, l’hydrogène apparaît comme un choix assez évident, mais quels sont les obstacles, les opportunités et les risques de cette technologie? Afin de répondre à ces questions, les agents économiques et politiques doivent acquérir certaines connaissances de base, d’où notre idée de mettre sur pied ce CAS en hydrogène.

Ali Çoskun: L’hydrogène, c’est l’avenir! C’est aussi simple que cela. Bien sûr, d’aucuns me rétorqueront qu’il reste à régler les problèmes de stockage ou de transport. Cela dit, nous avons fait d’immenses progrès ces dernières années, sans oublier que l’enjeu est crucial sur le plan de l’indépendance énergétique et sur le plan environnemental. L’eau est LE combustible de l’avenir.

Pensez-vous vraiment que l’hydrogène soit capable de remplacer les énergies fossiles?
Ali Çoskun: Je pense que ce sera en particulier le cas dans le domaine de la mobilité, avec des bus, des camions, des trains et des avions propulsés à l’hydrogène. Pour l’heure, les prix des combustibles fossiles nuisent à la compétitivité de cette technologie. Il faudra aussi mettre sur pied un maillage dense de stations de recharge. Il n’existe pas encore, mais souvenez-vous, il y a peu, il en allait de même pour les stations de recharge des véhicules électriques.

Jean-Nicolas Aebischer: Il faut savoir que toutes les énergies non fossiles sont des David qui luttent contre des Goliath. Tant qu’on ne connaîtra pas la réalité des coûts des hydrocarbures, ce sera difficile de régater. L’urgence climatique et les événements géostratégiques récents viennent toutefois changer la donne. Il faut le marteler: Les énergies non fossiles sont celles de la liberté, pas de la dépendance.

Pour suivre ce CAS, faut-il avoir un background scientifique?
Ali Çoskun: Il faut avoir un bachelor au minimum, mais pas nécessairement, en sciences, car le module de base, qui donne droit à une attestation de suivi de cours, ne requiert pas de connaissances spécifiques. Ce CAS s’adresse à des entrepreneurs·euses, des ingénieur·e·s ou des investisseurs·euses qui souhaiteraient connaître les potentialités de cette technologie, ainsi que son contexte technologique et juridique. Production, stockage, mesures de sécurité, réglementations et applications n’auront plus de secret pour les participant·e·s.

Qui seront les intervenant·e·s lors de ce CAS?
Jean-Nicolas Aebischer: Il y aura bien sûr les spécialistes de nos deux institutions, mais aussi des intervenant·e·s externes qui sont les références en la matière, dont les spécialistes du Laboratoire fédéral d’essai des matériaux et de recherche (EMPA), du Paul Scherrer Institute (PSI) et de l’EPFL. C’est aussi une immense opportunité de réseauter avec des participant·e·s de tous les milieux. Il y aura des visites de site, comme celui de Schiffenen, où se trouve la centrale à hydrogène du Groupe E, la première de Suisse occidentale. Ce CAS est un véritable écosystème autour de l’hydrogène.

La Haute école d’ingénierie et d’architecture et l’Université de Fribourg ne sont qu’à un jet de pierre l’une de l’autre, mais elles restent deux institutions distinctes. Comment s’est déroulée votre collaboration?
Jean-Nicolas Aebischer: La convergence avec l’Université de Fribourg s’est presque faite de manière naturelle car, même si nous n’avons pas le même ADN, la Faculté des sciences et de médecine explorant les sciences de base, l’HEIA-FR les technologies, nous partageons de nombreux points de convergence.

Ali Çoskun: C’était une expérience unique, sans bureaucratie, qui nous a permis de rester focaliser sur la science. Nous avons très vite vu que nous avons des expertises complémentaires. Il y a un potentiel massif qui laisse entrevoir d’autres collaborations fructueuses. C’est une offre unique, le premier CAS en Suisse occidentale qui met l’accent exclusivement sur l’hydrogène.

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